Dragon Age The Veilguard – TEST PS5 : Entre inclusivité et virage stylistique, est ce un bon RPG ?

Dragon Age The Veilguard - TEST PS5 : Une prise de risque audacieuse ou une grosse erreur de jugement ?

Dragon Age The Veilguard est un jeu en demi-teinte. Bioware a osé une rupture artistique et narrative, tentant de moderniser la franchise pour toucher une audience plus large. Ont-ils fait le bon choix ?

TEST sans spoiler de Dragon Age The Veilguard

La sortie de Dragon Age: The Veilguard, le dernier né de Bioware, suscite de grandes attentes. Annoncé comme une suite de Dragon Age: Inquisition, ce nouvel opus était censé plonger les joueurs dans une aventure encore plus intense et épique dans l’univers de Thédas. En réalité, The Veilguard s’avère être une expérience déconcertante, oscillant entre innovation et choix discutables. Si certaines qualités méritent des éloges, le jeu peine à répondre pleinement aux attentes des fans et des amateurs de RPG exigeants. Décryptons ensemble ce pari audacieux, mais inégal de Bioware.

Avant de commencer parlons de l'éléphant dans la pièce

Je me permets de faire une parenthèse d’analyse sur les récentes discordes touchant le caractère inclusif lgbt assumé du jeu. Commençons donc par ça pour ensuite se concentrer sur le jeu en lui-même.

Dans Dragon Age: The Veilguard, la personnalisation des personnages se veut inclusive, avec des options qui répondent aux attentes de nombreux joueurs et joueuses souhaitant créer des personnages diversifiés, allant au-delà des représentations traditionnelles. L’éditeur de personnages introduit ainsi des choix inédits, notamment des options de personnalisation trans, permettant de concevoir des personnages qui sortent des normes de genre habituelles. En intégrant des détails comme les cicatrices de mastectomie, The Veilguard ouvre la voie à des représentations plus vastes et progressistes de l’identité de genre, un choix qui a été salué pour sa représentation inclusive des personnages transgenres, mais aussi fermement critiqué.

Cependant, cette inclusivité soulève un paradoxe intéressant : si l’éditeur de personnages s’efforce de proposer une grande variété d’options de genre atypique, les possibilités de créer des femmes avec des formes voluptueuses restent, quant à elles, étonnamment restreintes. Les options de personnalisation de la taille des seins et des hanches des personnages féminins sont volontairement limitées, rendant difficile la création de personnages correspondant à des morphologies féminines plus marquées.

L’implémentation des pronoms neutres « iel » ou « they » dans Dragon Age: The Veilguard a non seulement provoqué des défis linguistiques pour les traducteurs, notamment en allemand, mais elle soulève également des questions plus profondes. Dans une langue comme l’allemand, où le genre grammatical est structurellement intégré, ces modifications forcent des adaptations parfois artificielles et peu naturelles, compromettant la fluidité et la cohérence de la traduction. Au-delà du défi technique, l’intégration de ces pronoms reflète un choix de Bioware qui semble imposer une adhésion tacite à une vision particulière du genre, largement construite sur un fondement politique. Cette décision, qui relève davantage d’une prise de position que d’un enrichissement du gameplay, oblige les joueurs à intégrer des concepts sans lien direct avec l’intrigue ou l’immersion du jeu, au risque de diviser davantage qu’elle n’inclut.

En conclusion, Dragon Age: The Veilguard, derrière ses intentions inclusives, révèle une conception paradoxale de la diversité. Bioware, en choisissant d’incorporer des options de personnalisation qui permettent la création de personnages transgenres et non conformes aux genres traditionnels, démontre une volonté louable de représentation et d’inclusivité. Pourtant, en restreignant simultanément les options pour créer des personnages féminins aux formes plus voluptueuses, le jeu impose une autre norme, qui brime curieusement une certaine liberté d’expression physique.

Ce choix soulève des questions inconfortables : comment l’inclusivité peut-elle prétendre être authentique quand elle exclut de fait certaines représentations corporelles ? Peut-on véritablement parler de diversité si elle se manifeste au prix d’un autre type de diversité ? En tentant d’éviter certaines représentations jugées « trop classiques » ou « trop sexualisées », The Veilguard impose une vision standardisée de la féminité, ironique pour un jeu qui se veut ouvert et progressiste. C’est peut-être ce paradoxe, le « wokisme » ?

Bref, passons au test du jeu en lui-même !

Une intrigue qui peine à décoller

Dragon Age: The Veilguard commence après les événements de Dragon Age: Inquisition, un choix de continuité qui devrait renforcer l’immersion pour les fans de longue date. Dans un monde où les fissures du Voile (ou « Veil ») continuent de menacer Thédas, le joueur incarne un héros chargé de rétablir l’équilibre entre les mondes. Les prémices sont intéressantes, mais le démarrage se révèle très lent. Comptez environ 15 heures avant de débloquer l’ensemble des compagnons de route, ce qui retarde considérablement l’action et l’établissement de liens avec eux. Ce choix narratif n’est pas atypique, mais il est discutable au vu de l’équilibre global du jeu (nous allons y revenir). Les joueurs devront patienter longtemps avant de profiter d’une équipe complète et d’en tirer le meilleur parti en combat.

La progression dans l’intrigue manque également de tension. Là où les premiers jeux Dragon Age parvenaient à captiver dès les premières heures, The Veilguard semble s’étirer inutilement. Les enjeux sont là, mais le rythme peine à captiver. Les interactions trop banales n’aident pas à se plonger dans ce nouvel arc narratif. En somme, même si Bioware avait pour objectif de construire une montée en puissance progressive, la longueur de cette mise en place risque d’aliéner de nombreux joueurs.

Une bonne équipe peut tout changer !

Au cœur de la franchise Dragon Age, les dialogues sont souvent un régal : des échanges percutants, teintés d’humour, de cynisme, et de profondeur morale. Malheureusement, The Veilguard se révèle plat sur cet aspect crucial. Les discussions manquent cruellement de profondeur et de spontanéité. Le ton se veut optimiste, voire excessivement positif, ce qui tranche avec l’atmosphère sombre et nuancée attendue dans un monde de dark fantasy. Les échanges entre personnages se limitent souvent à des banalités, où chacun évite d’aborder de véritables dilemmes. Les dialogues sonnent ainsi plus comme des conversations de « machine à café » que comme de véritables confrontations d’opinions, et l’on se surprend parfois à passer des scènes de dialogue qui semblent interminables. Il y a une vraie dynamique unilatérale dans le prisme des idées, même dans un groupe hétéroclite.

Pour les puristes de RPG, cette approche peut s’avérer frustrante. Les choix de dialogues, très dirigés, laissent peu de place à une véritable liberté d’interprétation du personnage. Le manque de diversité dans les options de dialogue entrave le sentiment d’incarner un héros unique. Contrairement à des jeux comme Baldur’s Gate 3, qui offrent une profondeur scénaristique et des choix significatifs, The Veilguard simplifie le processus, rendant les interactions presque mécaniques. Bioware semble ici avoir voulu rendre l’expérience narrative plus accessible (pour pas dire inclusive), mais au prix de sacrifier le cœur même du « role play ».

La direction artistique est audacieuse, mais déroutante

L’un des choix les plus controversés de The Veilguard réside dans sa direction artistique. L’esthétique, autrefois ancrée dans une ambiance réaliste et sombre, laisse place ici à des visuels plus colorés, presque cartoonesques. Ce changement de style graphique peut surprendre les fans habitués à l’univers oppressant de Dragon Age. Les environnements de Thédas sont toujours aussi beaux, mais ils perdent en intensité avec cette palette plus éclatante qui ne colle pas toujours avec les enjeux dramatiques du jeu. Néanmoins, le plaisir des yeux est là et les environnements sont parfaitement travaillés et offrent de somptueux panoramas. Personnellement, j’y trouve même un certaine inspiration de Fable premier du nom.

Pour certains, cette rupture graphique peut représenter une bouffée d’air frais ; pour d’autres, elle dilue l’essence même de la licence. La dissonance entre cette ambiance visuelle et le ton théoriquement sombre de l’histoire crée un décalage, et le choix d’une esthétique plus légère nuit à l’immersion dans ce monde de dark fantasy. En tentant de moderniser l’apparence du jeu, Bioware prend le risque d’égarer les joueurs qui recherchent une expérience visuelle cohérente avec la tonalité sombre de Dragon Age.

Des animations faciales et des effets capillaires remarquables, mais une interface confuse

En matière de technique, Dragon Age: The Veilguard brille par certains aspects. Les animations faciales sont impressionnantes, ajoutant une touche de réalisme et d’émotion dans les moments-clés. De plus, la physique appliquée aux cheveux est étonnamment bien réalisée. Bioware fait ici un pas en avant. Cette avancée technique, bien que subtile, mérite d’être soulignée.

Cependant, en dehors de ces réussites, le jeu accumule quelques maladresses sur le plan technique. La mini-carte, ainsi que l’interface de navigation en général, sont confuses et parfois bâclées. Les indications manquent de clarté, rendant l’exploration laborieuse. De plus, le léger input lag constaté dans les menus et dans le gameplay affecte la fluidité générale de l’expérience, ce qui est particulièrement frustrant dans un jeu où la réactivité devrait être de mise. Les transitions entre les menus, marquées par de longs fondu au noir, cassent aussi le rythme.

Les grosses influences du jeu et son identité hybride

Il est difficile d’ignorer l’influence de God of War (2018) dans The Veilguard, tant sur le plan du level design que des mécaniques de gameplay. À l’instar de God of War, The Veilguard propose des zones semi-ouvertes reliées entre elles, ponctuées d’énigmes environnementales et d’éléments de soft RPG. Les énigmes, bien que divertissantes, sont souvent répétitives et n’apportent pas une réelle plus-value à l’aventure, contrastant avec la finesse d’exécution du jeu de Santa Monica Studio. Les zones sont certes variées, mais leur linéarité limite le sentiment d’exploration et d’aventure.

La structure des équipements et la gestion des compétences rappellent aussi le chef-d’œuvre de God of War, mais ici encore, la copie semble inachevée. Bien que l’on puisse redistribuer librement ses points de compétence, les classes et spécialisations restent limitées, restreignant les possibilités de personnalisation. Ce choix de simplification vise peut-être à rendre le jeu plus accessible, mais il en résulte un sentiment de répétition et de manque d’innovation.

Dragon Age: The Veilguard tente de se positionner entre plusieurs genres. En mêlant l’action de type God of War et l’aventure à choix multiple, le jeu cherche à plaire à un large public. Cependant, cette tentative de compromis laisse une impression mitigée. Le manque de choix de classes, la linéarité des zones et le faible impact des choix de dialogues (pourtant nombreux) limitent l’aspect RPG à mes yeux.

L’aspect exploration est aussi négligé, les zones traversées étant majoritairement guidées et peu engageantes. Contrairement à un RPG classique où la curiosité est récompensée, ici, l’exploration s’apparente davantage à une formalité, chaque zone menant simplement à la suivante sans réel mystère ni découvertes marquantes. Il est clair que le jeu propose des choses comme l’impact de décisions clés sur le comportement des alliés, mais comme mentionné plus haut, ce n’est pas une bifurcation si fatale que ça. 

Conclusion

Avec Dragon Age: The Veilguard, Bioware propose une expérience hybride qui, en tentant de moderniser la franchise, prend le risque de s’éloigner de ce qui a fait son succès. Si le jeu bénéficie d’une direction artistique audacieuse, de superbes animations faciales et de détails techniques impressionnants, il reste en retrait sur des éléments essentiels comme l’écriture, la liberté de choix et la profondeur de l’intrigue.

The Veilguard est avant tout un jeu en quête d’identité, oscillant entre plusieurs genres sans vraiment parvenir à se fixer. Bioware a tenté d’attirer un public plus large, mais cet effort de compromis risque de ne satisfaire ni les fans de la première heure, ni les amateurs de RPG modernes. Ce n’est pas un mauvais jeu, mais il est difficile de ne pas y voir un potentiel inexploité.

Si vous êtes curieux ou amateur d’action-RPGs, Dragon Age: The Veilguard pourrait vous offrir quelques heures de plaisir. Mais pour les fans inconditionnels de la licence Dragon Age, ce dernier opus pourrait bien se révéler être une déception, marquant peut-être une transition incertaine dans l’histoire de Bioware.

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